Où il n'est bien sûr nullement question, ni d'automne, ni de Tokyo…

31 mars 2007

Coïncidences II

Posté dans : Memento, par Dave A. à 5:16

Il y a sept ans, Stella est morte.

C’est pas très beau, ça comme phrase. C’est cru, ça manque d’euphémisme poétique, de distance stylistique… Mais justement, je n’ai pas envie de faire du style ce soir.

Sept ans, c’est long. Suffisamment long pour que le souvenir s’en perde presque derrière l’horizon du chemin parcouru depuis. Trop vivide et lointain à la fois, ce souvenir. Je me demande parfois s’il s’agit de la même vie, s’il y a vraiment continuité entre ce début de printemps de la fin du dernier millénaire et le présent, alors que j’essaie de me remémorer des détails, d’année en année moins précis.

Mais en fait, les détails sont là, gravés et inamovibles dans le livret d’une histoire qui s’est rejouée des millions de fois dans ma tête depuis. Ce que j’ai peur d’oublier un jour, c’est les émotions, bonnes et mauvaises, qui se sont succédées. Ces émotions qui se désagrègent pour laisser place à de nouvelles émotions, plus récentes, moins douloureuses si possible, je vis dans la hantise de les perdre. Je m’y accroche comme on s’accrocherait aux maigres pièces à conviction d’une enquête qui n’a jamais abouti.

J’ai toujours pensé qu’avec le temps et le recul, en conservant bien tous ces souvenirs inchangés, alignés dans ma mémoire, je finirais forcément par en tirer une explication… Les sortant à intervalles réguliers, m’entêtant à les raviver, les examiner, les analyser, les ressasser, jusqu’à ce que je n’en puisse plus de tristesse et d’incompréhension et ne parvienne qu’à les remiser jusqu’à la fois suivante.

La vérité c’est que ce qui ne fait pas sens à un moment donné d’une vie, ne s’éclaircit jamais miraculeusement un beau jour, comme s’il avait fallu atteindre un âge donné pour que le déclic se produise. Ce genre de deus ex machina philosophique fumeux que l’on retrouve dans les oeuvres insipides d’écrivaillons paresseux, ça n’arrive jamais dans la vraie vie.

Il y a sept ans, Stella est morte. Pas moi. Je cherche toujours la morale que l’ordre cosmique aurait voulu m’inculquer ce jour-là. Je ne crois pas qu’elle existe.

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et ignotas animum dimittit in artes