Où il n'est bien sûr nullement question, ni d'automne, ni de Tokyo…

15 novembre 2006

Septembre en Trois week-ends (pt. 3)

Posté dans : l'Actualité, par Dave A. à 9:20

Les mariages, c’est surtout un bon prétexte pour retrouver, suivant les cas : les cousines que l’on n’a pas croisé depuis l’âge où on leur tirait les couettes en vacances à la montagne, ou bien les amis plus récents éparpillés au gré des continents et des arrondissements. C’est aussi l’occasion de mesurer les ravages de l’amour et du temps sur la convergence paritaire des uns et des autres.

Ce week-end là, certains se disaient oui, d’autres s’entraînaient à dire oui et quelques uns s’entraînaient à dire non… Pour ne rien dire des couples tendance damnation éternelle et interdiction de mairie qui s’entraînaient au reste. Assurément on était loin des contes de fée d’antan malgré la proximité de Brocéliande. Papa Ours et Papa Ours, si mignons dans leur costumes assortis, Boucle d’Or plus intéressée par Blanche Neige, et Sept Nains un peu perdus loin de leur Marais natal… Quant au chevalier de l’Hétérault : il n’essaie même pas de faire croire que son port de la moustache pornoprussienne et des lunettes assorties puisse relever de l’ironie… Dans un monde où les frontières sexuelles semblent toujours plus élusives, il est des valeurs qu’il importe de préserver, fussent-elles celles du cinéma allemand pour adultes des années 70. Loïc, lui, préfère courir après des marathoniennes… Ça entretient la forme, sinon le moral, paraît-il.

Et Elle dans tout ça ?

Que reste-t-il de nos amours ?

Compte-tenu de l’âge, date et cause du décès, je dirais : peut-être quelques bouts de cubitus et un bon mètre-cube de terreau fertile. Pour le reste, il faudrait demander à un légiste, je suis pas spécialiste de ces choses là.

Enfin, l’essentiel, c’était de pouvoir passer 36 heures sur le même continent et se séparer sur un sourire et une promesse de se revoir à l’occasion, aussi amicale que dénuée de la moindre intention de s’y tenir. Je ne sais pas ce qu’elle me doit, mais je dois bien lui devoir au moins ça.

1 novembre 2006

Septembre en Trois week-ends (pt. 2)

Posté dans : l'Actualité, par Dave A. à 4:29

Un des plaisirs pas si simples de la vie, que j’apprécie beaucoup plus que je ne le devrais, c’est de traverser une frontière les mains dans les poches. Voyager sans bagage, comme si j’étais juste sorti pour aller acheter du pain. Je ne le fais pas si souvent et à vrai dire, c’est plutôt l’inverse d’habitude : j’embarque ma maison dans deux valises partout où je vais. Je crois que l’avant-dernière fois remonte au nouvel an du siècle dernier, et c’était à Viennes. Mais ça, c’est pour un autre jour.

Le mois dernier, donc, je foulais le sol de Waterloo d’un pas somme toute assez peu prussien malgré l’heure matinale, un bouquin à la main, de la musique dans les oreilles et une cravate roulée dans la poche. Et comme j’étais d’une humeur incroyablement dispendieuse ce jour-là, c’est assis sur une banquette, discutant politique du continent indien avec mon chauffeur Sikh tout en achevant de nouer mon déguisement, que j’achevais mon trajet.

Je la connais à peine mieux, mon autre grand-mère, mais contrairement à ses homologues secoués du bénitier, elle a toujours favorisé le sourire de connivence à l’autorité sèche, dont je la soupçonne pourtant fort capable. D’abord, parce qu’elle sais trop bien d’où je peux tenir ce chromosome de l’obstination butée, façon chèvre à quatre cornes. Ensuite, parce qu’elle m’aime bien. Ici aussi je suis l’aîné des aînés, ici aussi ça compte, mais différemment.

Moi aussi je l’aime bien.

J’aime bien le parchemin mat de son visage et ses deux petits yeux verts pétillants comme une gamine qui n’aurait pas le dixième de son âge. J’aime bien le demi-sourire énigmatique rapporté de son Égypte natale dont elle ponctue presque toutes ses phrases. J’aime l’élégance de son accent : fût-une époque, j’aurais bien donné une ou deux phalanges pour pouvoir le troquer contre l’étrange diction cosmopolite que j’avais ramené des îles en même temps que mon enfance… Encore maintenant, je suppose… Évidemment, il est bien trop tard pour y remédier, et je me contente de camoufler du mieux possible les relents de nouveau continent qui ont tendance à surgir dans mes prononciations, tant je sais que sa pourtante modeste fibre patriotique en souffre.

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et ignotas animum dimittit in artes