Où il n'est bien sûr nullement question, ni d'automne, ni de Tokyo…

27 décembre 2006

Un conte de Noël (suite et fin)

Posté dans : Contes et Légendes, par Dave A. à 8:34

Suite et fin de notre conte de Noël pour enfant. Resservez vous un peu de whisky et prenez un siège au coin du feu…

« Alors même qu’au Pôle Nord se déroulaient les terribles événements que je vous narrai naguère, quelques kilomètres plus haut, au QG de la Jesus Incorporated, le Cortège Céleste suivait anxieusement les déboires du Père Noël, songeant avec effroi au coût faramineux qu’entraînerait une annulation de dernière minute et la nécessité de rembourser toutes les pré-ventes sur l’événement.

Saint Michel courait dans tous les sens, tentant de trouver un moyen de régler la situation: « Bon sang de bordel de Lui, mais c’est pas possible ! Vous savez le chiffre qu’on fait sur cette soirée seule ? On ramasse plus qu’à la Pentecôte et Pâques combinés ! Si on se mange sur ce coup, vous pouvez tous dire adieu à votre bonus de fin d’année : le 31, on le passera à laver des pare-brise à la sortie des supermarchés roumains… ».
Sans lever les yeux de son exemplaire du Paradis de Milton (tirage sur papier glacé illustré par Helmut Newton), Gabriel suggéra : « Et le Boss, dans tout ça ? Pourquoi vous allez pas tout simplement lui en toucher deux mots ».

« Aux dernières nouvelles, Il est dans sa suite au Hilton d’Acapulco avec 35 putes mexicaines et trois litres de mescaline. Il a promis que le premier qui le dérangeait au milieu de sa soirée d’anniversaire, il finissait dans un show del burro à Tijuana. »

« Je vois. Bon, après tout, on peut bien s’en occuper tout seul. Tout ce qu’il lui faut, au sénilisant à col fourré, c’est un peu d’Esprit de Noël. On n’a qu’à lui envoyer quelqu’un, un émissaire de bonne volonté… Ça devrait le calmer, lui et les autres… »

« Oui mais qui ? »

À ce moment, le stagiaire du bureau, un de ces jeunes loups pleins d’enthousiasme mièvre comme les détestait cordialement Gabriel : visages angéliques, auréoles acérées, bien décidés à se hisser dans la hièrarchie et prêts à lécher du derrière de séraphin jusqu’à la nuit des temps si ça pouvait les y aider… le stagiaire, donc, s’avança, toutes ailes frétillantes : « Moi, moi, je veux bien m’en charger ! Laissez moi donc allez répandre un peu de Joie de Noël dans le coeur engourdi de notre Père Noël, j’en fais mon affaire ! »
Avec un rire mauvais, Gabriel acquiesça : « La Joie de Noël, je sais pas, mais des joues roses d’angelot pré-pubère, ça peut certainement pas le laisser insensible, ce vieux porc libidineux… », puis tournant vers Saint Michel son magazine, ouvert sur la page centrale : « Regarde ça, je t’avais bien dit que la petite nièce Belzébuth était pas une vraie rousse… Par contre, pour ce qui est du reste, je suis prêt à lui faire goûter le corps du Christ quand elle veut, à celle-là… »

Il fut donc décidé d’envoyer le petit ange en mission au Pôle Nord pour sauver l’Esprit de Noël et, par la même occasion, son lucratif marché de produit dérivés, assurant plus de 20% des revenus annuels de la Jesus Inc. et ses filiales de par le monde. En outre, Gabriel l’avait chargé au dernier moment de récupérer auprès de Rudolphe, 30 grammes de sucre-canne non-coupé et un kilo de feuilles de houx jamaïcain pour « tresser des couronnes ».

Comme il avait reçu l’Amex Noir de la boîte pour couvrir tous frais éventuels, le petit ange se dit qu’il devrait en profiter et acheter un petit quelque chose en route, histoire de ne pas se pointer les mains vides. Il s’arrêta donc chez un pépiniériste et choisit le plus grand, le plus majestueux, le plus verdoyant sapin qu’il put trouver, le fourra tant bien que mal sur le siège passager de sa Miata, en se disant que, décidément, cette caisse était vachement plus pratique pour draguer à la sortie des couvents que pour transporter des courses.

Pendant ce temps, dans le bunker de crise, les carotides du Père Noël avaient pris une teinte assortie à ses manches et semblaient sur le point d’éclater :
« Comment ça, on fait pas le Chili cette année !?! »
« Cordillère des Andes. Trop risqué à basse altitude. Les assurances refusent de couvrir. »
« La Tanzanie ? le Kenya ? »
« Trop dangereux. Saletés de lions. On y a quand même perdu Blitzer et Donner à la pause pipi près de ce point d’eau, l’année dernière. »
« France ? »
« Pour se garer en double file sur les Grands Boulevards ? Monsieur tient vraiment à y laisser le traîneau-radio cette année encore ? »
« Espagne ?? »
« Bulle papale fraîche des télex du matin : excommunication générale pour cause de marriage gay… No mas España… Canada idem. »
« Mais vous foutez de moi ou quoi ? On l’aura couvert en 25 minutes, ce plan de vol à la con… Et on fait quoi du reste de la nuit ??? »
« Ben justement… Prancer connaît ce petit bar sympa à Buenos Aires et on se disait que… »
« Mais je vais en faire des hamburgers lapons de cette bande d’incapables ! On va bouffer du cervidé à la truffe pour le réveillon ce soir, c’est moi qui vous le dit ! »
C’est à ce moment précis que retentit dans la salle de conférence le tintement cristallin de la sonnette d’entrée, prenant le Père Noël par surprise et lui faisant temporairement relâcher son étreinte autour du cou bleuissant de Dasher…

À la porte, se tenait le petit ange, irradiant la Joie de Noël, portant sous son bras un magnifique arbre de Noël qui aurait réchauffé le plus engourdi des coeurs de vieillards renfrognés…
« Ho ho ho ! Joyeux Noël ! Ça va, vieux grincheux ? Bon, ce sapin, je le mets où ? »

Et c’est en souvenir de ce jour que, de par le monde, il n’est de Sapin de Noël décoré digne de ce nom, au sommet duquel la maîtresse de maison n’ait délicatement empalé un petit angelot aux joues roses et au sourire radieux quoiqu’un peu crispé. »

4 Comments »

  1. Content d’te revoir Doc’! Je vais me régaler à te lire dès pas plus tard que tout à l’heure (Vébé m’a confié son dog pourri et il faut qu’j’le ballade si j’veux pas qu’y m’pourrisse le Balto, au grand dam de Josy). A part ça, sans dèc’, ça fait plaisir d’te revoir…Parole… Sinon ça va toi?…

    Comment par Briscard — 28 décembre 2006 @ 5:58

  2. Je me suis régalé, juste régalé… ‘tain, tes contes tu viens les raconter au Balto quand tu veux: j’vais m’faire une clientèle de choix… aussi sec!

    Comment par Briscard — 28 décembre 2006 @ 10:21

  3. Franchement c’est le temps des gitans, là. Merde, quoi.

    Comment par Briscard — 9 janvier 2007 @ 11:20

  4. Laisse donc les Gypsy Kings hors de ça, Msieur Briscard… J’y peux rien, je suis pas un écrivain rapide. Ça veut pas dire que j’y mets pas du mien pour assurer un minimum de régularité.

    Comment par dr Dave — 15 janvier 2007 @ 3:24

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et ignotas animum dimittit in artes