Où il n'est bien sûr nullement question, ni d'automne, ni de Tokyo…

28 décembre 2008

Les rues de San Francisco (suite et fin)

Posté dans : l'Actualité, la Californie, par Dave A. à 3:22

Quand la limousine à vitres teintées s’est arrêtée au coin de la rue, on a hésité quelques secondes. Et puis comme rien ne bougeait autour, Lauren a décidé qu’elle préférait risquer le kidnapping à la marche…

On est à peine à l’intérieur, que le conducteur abaisse la vitre de séparation, fait un signe vague en direction des banquettes et redémarre avant même d’ouvrir la bouche.

« Larry m’a appelé. Vous avez de la chance, j’étais censé finir dans deux heures, mais les clients précédents ont rendu l’âme plus tôt que prévu. »
Remarquant nos haussements de sourcil interrogateurs dans son rétroviseur, il précise :
« Mort par overdose de Veuve Cliquot. Rien de bien méchant, ils s’en remettront. La veste à 5000 balles de monsieur et les tapis rouges de la réception du Mark Hopkins : probablement moins.
Bon, on va où ? Vous êtes pressés au fait ?
— Non, ça va. Pas d’urgence. Le plan du reste de la soirée n’a pas encore été étudié avec précision, mais on va y réfléchir. »

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13 décembre 2008

Les rues de San Francisco

Posté dans : l'Actualité, la Californie, par Dave A. à 8:21

Le téléphone décroche à la troisième sonnerie : au moins une de trop, plusieurs secondes de plus qu’il n’en faut pour étendre le bras vers un tableau de bord, c’est pas bon signe.

« Larry ?
— Lui-même.
— Toujours en affaires?
— Plus que jamais. »

Larry, depuis dix ans, c’est mon chauffeur de taxi attitré. À San Francisco, ville riche en colines et pauvre en transports, où les taxis choisissent leurs courses avec une minutie dédaigneuse et ne s’aventurent guère hors de Union Square après 2 heures du matin, il est indispensable d’en connaître au moins un ou deux par leur prénom. Ou d’aimer les marches nocturnes.

« J’aurais besoin de roues au coin de 16è et 8è, c’est envisageable ?
— Ça dépend : c’est urgent ? On vient de dépasser Fresno et même en tenant notre moyenne et en évitant les accidents de coyote, on en a encore pour six heures avant Vegas, un peu plus pour le retour.
— Las Vegas ? C’est pas un peu hors de ta juridiction ?
— Candy et Felicity avaient une urgence professionnelle. Tu me connais, je ne peux rien refuser à deux demoiselles en détresse et en tenue légère. »

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26 janvier 2007

La Dernière minute (pt. 2)

Posté dans : la Californie, par Dave A. à 4:19

Bon. Y’en a marre. Marre d’empiler les brouillons inachevés pour cause de virgule ankylosée à mi-phrase. Marre de passer des heures à me relire pour vérifier que mon orthographe est bien en conformité avec les dernières dispositions du 342è Concile du Collectif des Violeurs de Drosophiles en Réunion du Quai Conti. Marre de ressasser les paragraphes dans ma tête jusqu’à que j’en sois trop écoeuré pour écrire la moindre ligne. Marre de faire des efforts.

Merde à la fin, c’est qu’un carnet. On est pas là pour faire de la littérature. On est là parce que le Dr. Angstundsorgenstein a dit qu’au prix horaire de la consultation, soit un emprunt sur 20 ans, soit je trouvais un endroit moins cher pour ma thérapie de groupe.

Donc.

C’était par une sombre nuit d’orage, le vent glacial soufflait dans les aulnes avec un hurlement lugubre, la pluie fouettait le pavé et les grilles du manoir luttaient pour se libérer en d’inhumains grincements…

Non, pas vraiment en fait.

Ce matin là, sur Howard et Sixième, il faisait un temps radieux de fin de printemps san-franciscain, les petits oiseaux chantaient pas, mais le voisin avait déjà mis à plein volume son disque favori de polka mexicaine, le soleil s’était levé sans m’attendre, et à part une légère douleur hypertrophique résiduelle à l’entrejambe, j’étais en pleine forme. La veille, j’avais donné, vendu, recyclé, brûlé, ingéré, prisé ou mis en orbite la quasi-totalité de mes possessions terrestres. J’étais plus léger de plusieurs mètres cubes et presque prêt à m’envoler vers un autre continent. Mais pas vraiment pressé non plus. Avec ou sans mobilier scandinave et lit triple-matelassé, j’aimais bien ma routine indolente de l’époque.

Vingt minutes avec un large sac de glace pilée délicatement posé sur le bas-ventre, et j’étais prêt à démarrer ma journée. Brunch en patio, café et divers mélanges alcoolisés à base de jus d’orange (apport vitaminique oblige) au hasard des amis croisés dans Noe Valley, tournée bucolique des magasins de musique sur Upper Haight, deux heures payées à gloser grammaire et littérature étrangère avec des mères de famille en mal d’occupation, thé et goûter sur O’Farell, allo-t’es-où-?-un-spliff-dans-Dolores-park-ça-te-dit-?, apéro dans le Castro, essentiel quart-d’heure d’élaboration en groupe de l’agenda nocturne, cut, fondu scène intérieur d’un petit club du voisinage où je venais de finir de gagner quelques dollars et beaucoup d’alcool gratuit en passant quelques disques…

Deirdre me fit signe de la suivre vers les toilettes. Ou alors c’est moi qui lui avait fait signe, je sais plus. Peut-être même que c’est Tracy qui nous a tendu deux pailles et dit d’aller voir, troisième étagère sur la gauche, sous la statuette en bronze. Bref, des trucs peu recommandables. Non, pas ce genre de truc peu recommandable, l’autre genre de truc peu recommandable. Toujours est-il qu’on a à peine eu le temps de claquer la porte derrière nous. Et s’il y avait des trucs sous la statuette en bronze de la petite étagère, ils doivent toujours y être.

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26 septembre 2006

La dernière minute (pt. 1)

Posté dans : la Californie, par Dave A. à 2:25

Bon… Je sens qu’on en a tous marre du style télénovella de fin d’été qui règne sur ces pages, alors aujourd’hui on va changer un peu le décor.

Je vais vous parler de mon époque ponque.

Ma seconde époque ponque, pour être exact… Puisqu’il y eut bien une première époque ponque, mais celle-ci se situant à l’âge où tous les ados normalement constitués se font tatouer des toiles d’araignées sur les coudes, boivent des bières et squattent des entrepôts abandonnés, il n’y a guère matière à s’y attarder. La seconde non plus, d’ailleurs. Sauf qu’entre les deux, j’avais appris à apprécier à leur juste valeur les apports inégalables d’une literie de qualité et d’une hygiène corporelle moins négligée pour les interminables séances d’accouplement frénétique qui rythment la journée du ponque amoureux.

Mais avant d’en arriver là…

C’était la fin de ma vie à San Francisco. En tout cas ça se profilait à l’horizon brumeux. J’avais finalement pris la décision d’aller voir ailleurs. Essentiellement parce que, n’en déplaise à certains, il n’est aucun problème qu’un billet aller-simple pour un patelin inconnu à l’autre bout du monde ne puisse aider à résoudre, fût-ce en vous plongeant dans une toute nouvelle catégorie d’emmerdes propres à vous faire regretter les précédentes.

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15 septembre 2006

Turbulences spatio-temporelles

Posté dans : l'Actualité, la Californie, par Dave A. à 3:04

il y a maintenant pas mal d’années, par un joli matin ensoleillé de la fin du mois d’août, je fêtai mes 21 ans et me mariai dans une petite chapelle du Névada en présence d’une poignée d’amis chers.

Là où aurait dû se tenir le solennel organiste jouant Mendelssohn, Brian pianotait du dixie-jazz. En lieu et place des alliances qui ne furent achetées que bien plus tard, et pour sceller officiellement l’union à l’issue de la cérémonie, un dérisoire bouquet de fleurs, volées par Sarah à quelque plate-bande municipale sur le chemin de la chapelle.

Dans ces moments-là, toute l’ironie du monde ne pèse pas lourd face à cette sensation inexplicable de vertige qui vous prend à la gorge sans raison valable.

Il y avait, ce jour, beaucoup d’éléments comiques, avec peut-être quelques petits bouts de tragique, mais surtout beaucoup de vrai. Du vrai, émouvant et larmoyant, qui se grave dans vos neurones au pic-à-glace et ressort ensuite toujours aux pires moments.

Une demi-douzaine de vies se sont écoulées depuis. Presque autant de morts donc. Cette mort-là ne fut pas particulièrement douce. Pas tant par la perte d’un amour qui n’existait déjà plus alors, que par la perte d’une amie, d’une confiance et la sensation de trahison qui rend plus seul que n’importe quel rupture ne pourra jamais.

Après-demain, nous serons à nouveau ensemble devant l’autel, de part et d’autre de ceux qui, incidemment, nous marièrent il y a toutes ces années. La boucle est donc bouclée et le destin n’a pas perdu son légendaire sens de l’humour.

10 avril 2006

Trois Souvenirs Acidulés pt. I

Posté dans : la Californie, par Dave A. à 5:45

I hate to advocate drugs, alcohol, violence or insanity to anyone, but they’ve always worked for me.
Hunter S. Thomson

Blackrock City, Nevada. 3 Septembre de la fin du second millénaire, vers 7 heures du soir.

Assis sur une caisse de champagne, j’opère le désensablage rudimentaire de mon verre avant d’y jeter quelques glaçons généreusement arrosés de vodka, jus de tomate puis d’une demi-douzaine d’épices et ingrédients variés. Au milieu du désert, le Bloody Mary est bien plus qu’un simple cocktail: c’est un breuvage indispensable à la survie de l’homme blanc en terrain aride semi-hostile. Fournissant d’une part sa ration de nutriments et sel minéraux au bédouin des temps modernes, lors que son niveau savamment contrôlé d’acidité citrique et de piments contribuent à garder éveillé chez le consommateur une saine envie de rester hydraté.

Il n’y a plus de raifort sauvage: un Bloody Mary correct étant désormais hors de question, il faut se rabattre sur un Cosmopolitan. Monde cruel.

J’ai à peine fini de servir le sien à Becky que Tom surgit et dépose le coffre à costumes à nos pieds en nous intimant de nous dépêcher pour ne pas rater l’allumage du bûcher qui ne saurait tarder.

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27 octobre 2005

Nos Gentils Voisins

Posté dans : la Californie, par Dave A. à 7:14

Bonne nouvelle: non seulement la cellule de dégrisement de mon commissariat local est équipée du dernier cri en matière de technologies informatiques, mais en plus, la geôlière dort à poings fermés…

Reprenons donc…

Avant même que nous n’emménagions, Alexandra et moi, Ricardo avait tenu à être franc sur un sujet: quatre à cinq fois par an, il lui incombait d’organiser l’accueil d’un cercle élargi de ses relations pour une soirée à caractère thématique. Le thème en question reposant essentiellement sur l’application mutuelle de châtiments corporels à vocation érotique. Une sorte de club de lecture spécialisé dans certaines oeuvres fin du XVIIIè avec un intérêt particulier pour la mise en pratique.

Une soirée S&M, et pas n’importe laquelle, puisque, l’événement étant relativement coté parmi quelques personnalités publiques de la région, le port du loup vénitien y était tout à fait commun, à des fins confidentielles, sinon ludiques.

A ce stade du récit, et compte tenu des mentions de fouet, notables locaux et port du masque, il sera pardonné au moins Kubrickien des lecteurs d’avoir à l’esprit des visions de messes démoniaques baignées de vapeurs surréalistes qui se dissiperaient par endroit pour révéler tour à tour les insoutenables silhouettes d’adolescents pré-pubères, ex-mannequins héroïnomanes, innocents hamsters et autres ratons laveurs, tous à la merci des perversions lubriques d’une poignée de néo-patriciens sanguinaires…

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14 octobre 2005

La Fête à la Maison

Posté dans : la Californie, par Dave A. à 4:02

Plus ça va, plus ce blog s’écarte énormément des valeurs fondamentales du blogging. A savoir: masser mon ego en racontant ma vie à des inconnu(e)s et en économisant sur mes frais de psychanalyse.

Le problème, c’est que des blogs de thérapie de groupe, j’en ai déjà deux, et j’ai horreur de me répéter, fut-ce dans des langues différentes. Donc pour tout ce qui concerne mes fascinantes aventures au pays des distributeurs automatiques de petites culottes, j’ai peur qu’il ne vous faille aller les lire en version originale pour le moment.

À défaut, j’ai décidé de déterrer quelques souvenirs de ma folle jeunesse sous le doux soleil de Californie (d’autant plus doux qu’il a pas mal de couches de dioxyde de carbone à traverser pour taper sur les trottoirs de Sunset Blvd). Un choix essentiellement motivé par le statut de prescription couvrant la plupart des faits relatés et devant a priori me préserver de tout risque de poursuite au pénal. Pour bien faire et rester chronologique, j’aurais probablement du commencer avec les années Londres, mais là, pour le coup, mon avocat m’assure qu’il vaut mieux encore attendre quelques temps avant de commencer à balancer le nom de tous les show-bizzeux pour lesquelles mes responsabilités de serveur de l’étage V.I.P. relevaient autant sinon plus de la géométrie conique et du maquettisme ferroviaire poudreux que de la concoction de vodka-martinis.

En conséquence, je pense qu’une rapide introduction scénique des principaux protagonistes ne pourra que bénéficier à la clarté des bien pauvres anecdotes qui, n’en doutez pas, deviendront un thème récurrent de ce blog en attendant mieux:

Mise en Situation Temporelle

Située aux jours heureux de l’entre-deux-Bushs, l’époque précise du récit importe peu. Par intérêt historique, on pourra tout de même mentionner que les seules explosions de bulles de silicones à déplorer sont encore limitées aux cliniques privées d’Orange County. Le recrutement pour le poste d’Ennemi Juré des Etats-Unis bat son plein: depuis la décennie précédente et la défection du Rouge Mangeur d’Enfants, la position reste vacante malgré quelques brefs intérims menés de plus ou moins bonne grâce par Saddam Hussein. Les Terroristes n’ont pas encore eu le mauvais goût de venir laver leur linge sale à coup de Boeings 747 sur le sol New Yorkais… Et il est par conséquent encore possible d’atterrir à LAX avec son coupe-ongle ou trois grammes d’échange culturel dans les chaussettes sans finir à Guantanamo. Les vêtements se portent avec des trous si vous habitez Seattle, avec des taches douteuses si vous êtes stagiaire à Washington. L’insouciance règne. La vie est belle en technicolor et en son THX.

Mise en Situation Spatiale

Le fief de West Hollywood ne serait pas sans rappeler à nos lecteurs parisiens une sorte de quartier du Marais, à condition de remplacer les charmantes petites ruelles d’icelui par des autoroutes quatre voies. Sinon, le peuplement de la région s’est fait de manière assez similaire: comptant un fort pourcentage de juifs immigrés d’Europe de l’Est d’un coté, mais aussi en compétition serrée avec San Francisco et Palm Springs pour le titre de plus grand fan-club local de Judy Garland et Liza Minelli. Le candidat idéal à l’implantation sera donc à la fois gay et ashkénaze. Et riche de préférence.

Ce qu’il faut retenir: A West Hollywood, on ne dit pas: « vieille peau cinglée qui garde les dépouilles de tous ses chats dans un congélateur à la cave », on dit: « riche excentrique ».

La Distribution

Mais quels sont les délicieux personnages qui vont agrémenter cette fresque épique de la vie d’un Européen en Californie du Sud?

Tout d’abord il y a bien sûr:

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et ignotas animum dimittit in artes